Roussette, fille d'une chèvre commune tourangelle et d'un bouc alpin, s'est éteinte à l'âge de 15 ans.
Instruit à mes débuts par l'élevage intensif, j'ai présenté Roussette à un bouc alpin (il n'existait plus de bouc tourangeau) à l'âge de 7 mois. Elle a donné naissance à un petit chevreau, et nous a alloué plus de 800 litres de lait. Je promène mes deux chèvres toute la journée, avec des repos imposés par elles pour se reposer et ruminer. La nourriture est essentiellement composée de pâturages et surtout de sous-bois : ronces, lierre, feuilles de noisetiers, de cornouillers, de chênes, de tilleuls, de maronniers, de châtaigniers... L'herbe est essentiellement pâturée entre février et juin, avec une reprise momentanée entre les deux Notre-Dame : 15 août, 8 septembre. Je donne du fourrage en complément l'hiver. Roussette a donné la vie à deux petits l'année suivante et a dépassé les mille litres de lait sur l'année. Ensuite, je ne l'ai fait saillir que tous les deux ans ; plus de 700 litres de lait la deuxième année...
À partir de l'âge de 7 ans, je ne l'ai plus fait rencontrer le bouc. Pourtant elle nous a prodigué du lait pendant 8 lactations jusqu'à sa mort dans mes bras. Encore plus de 200 litres de lait la dernière année... Aujourd'hui, dans ma 74e année, je n'ai plus que Pâquerette, petite fille de Roussette, qui va vers ses 7 ans. Elle nous a offert 900 litres de lait à la suite de deux naissances, il y a quatre ans. Printemps et été de cette année, elle nous a alloué deux litres de lait par jour ; en ce moment, 1er novembre, un peu plus d'un demi litre.
À un vétérinaire qui s'étonnait de cette profusion de lait, j'ai répondu : sans doute une récompense de l'amour à l'amour. Merci Roussette et Pâquerette.
Jean Domec, 1999
Note de la société d'ethnozootechnie : qui, parmi les physiologistes, aurait pu croire qu'une chèvre était encore capable de donner du lait huit ans après avoir été saillie pour la dernière fois ?