Mireille admire, raille, refuse, et s'enfuit

� Le cort�ge d'�nes, de boucs, de b�liers, de ch�vres, de chevrettes et de petits chevreaux, descendant des montagnes du Dauphin� dans la Crau aux sons des clochettes appendues au cou des b�liers conducteurs et suivi du p�tre envelopp� de son lourd manteau, est une de ces sc�nes calqu�es sur les flancs des montagnes, aux rayons d'un soleil d'automne.

Le pasteur, environn� de ses chiens blancs et �normes, passe avec orgueil cette revue de ses richesses au d�fil� des monts dans la plaine. Alari, ce riche possesseur des troupeaux ambulants, aborde Mireille sur le seuil du mas, sous pr�texte de lui demander le chemin, mais, en r�alit�, pour sonder son cœur. Il lui fait pr�sent d'une coupe taill�e dans le buis, cisel�e de ses mains pendant les longs loisirs solitaires du p�turage. Le bouclier d'Achille, dans l'Iliade, n'est pas mieux d�crit que cette coupe avec ses bas-reliefs sculpt�s au couteau.

Mireille admire, raille, refuse, et s'enfuit. »

Alphonse de Lamartine, Cours familier de litt�rature (T.7 extrait), 1859