Au sud de l'Alsace, dans le Jura, à la frontière Suisse, se situe le Sundgau. Ce magnifique pays, aux belles demeures paysannes, marqué par la religion chrétienne, berceau de la dynastie des Habsbourg, se révèle essentiellement rural.
L'extraordinaire savoir, transmis de générations en générations, par les familles des paysans sundgoviens, fait qu'au début du XXe siècle, la chèvre du Sundgau, branche de la famille des Alpes, fut appréciée comme la plus grande laitière d'Europe. [1]
Aussi, n'est-il pas étonnant que l'espèce caprine, la chèvre, le bouc, le chevreau, ait une place de choix dans « Le Lexique des parlers sundgauviens » [2]. Geiss, diminutif Geissli, pour la chèvre ; Bock, Beckli, pour le bouc ; Gitzi pour le chevreau, donnent naissance à une richesse de proverbes, de dictons, de sentences, associant les qualités et les défauts des petits ruminants à ceux des humains et d'habitants de localités. C'est ainsi que : un homme lubrique et paillard, un jeune garçon espiègle et malicieux, un individu têtu et buté ; un arrière goût musqué de certains vins, sont inspirés par le bouc ; un individu maigre rappelle le physique de la chèvre, aussi les tailleurs qui passaient pour maigre sont-ils figurés par la chèvre. Quant au mécréant, on lui dit « Après ta mort, tu iras au paradis des chèvres ! »
La chèvre, animal sacré, aimée mais crainte, fédère la richesse des langues de la civilisation européenne paysanne, en l'occurence celle du Sundgau.
Après Le dictionnaire du monde rural de Marcel Lachivier [3] qui a recensé 45 000 mots, issus de la civilisation paysanne française, je conseille aux passionnés de la vie et de la créativité des hommes de la terre de lire Lexique des parlers sundgauviens de Christian Bader. [4]
Jean Domec, 2004
[1] La Chèvre par Joseph Crépin, Hachette - 1906.
[2] Editions du Rhin - 1997.
[3] Fayard - 1997.
[4] Editions du Rhin - 1997.