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Pour un vrai Cahier des Charges Bio
Je vis entouré d'animaux de ferme, notamment de volailles. Je laisse au coq et aux 17 poules le choix de passer la nuit, perchés dans les arbres ou protégés des intempéries dans un poulailler. Les poules de races rustiques, la Géline de Touraine, la Marans, la Gauloise dorée, la Pictave, préfèrent passer la nuit au grand air, l'Orpington, la Brahma, choisissent l'intérieur. Celles qui dorment sur les arbres m'obligent à ruser avec le renard. Celui-ci vient volontiers les saisir pour s'en nourrir au lever du jour. Aussi, le goupil m'oblige-t-il à me lever de plus en plus tôt, au printemps et en été, car il se sauve quand il me voit.
J'observe la vie de ces animaux depuis quatorze ans. les rustiques parcourent prairies et sous-bois dans un va-et-vient incessant. Errantes, aventureuses, chercheuses infatigables de nourriture variée ; au contraire, Brahma et Orpington se contentent d'un espace plus réduit tant leur nonchalance se montre grande. Aussi, la qualité de leurs oeufs s'avère moindre. Toutes aiment se reposer sous l'ombrage des ifs, des buissons, des arbres au printemps, en été, en automne ; protégées par mur ou haies, au soleil s'il est présent, en hiver.
Quant au coq, Géline de Touraine, quelle merveille de le voir au milieu des poules marcher majestueusement, sûr de son courage et fier de sa beauté, tout en s'occupant avec attention et parfois inquiétude de ses compagnes. En effet, il ne les perd jamais de vue, allant chercher et ramenant celle qui s'égare ou celle qui, effrayée par le passage insolite d'un chat, appelle au secours, tout en égayant la communauté de son chant. Courtois et galant, il ne mange jamais avant que les poules ne se soient rassasiées.
En élevage naturel, la poule évoque les qualités de la très bonne mère ; elle chasse les oiseaux de proie et protège avec amour ses poussins, ne dorment-ils pas sous ses ailes jusqu'à plus de deux mois ! La Jeune poule commence à pondre à la fin de sa première année ; la fécondité atteint son maximum entre deux à quatre ans, elle diminue ensuite progressivement, aussi la paysanne vendait-elle sa poule, pour confectionner un pot-au-feu, entre quatre et cinq ans. La poule en liberté et en plein-air commence sa ponte à la fin de l'hiver, pour se poursuivre au printemps et en été, s'arrêtant avec la mue. La ponte est rare à la fin de l'automne et au début de l'hiver.
Nos poules se nourrissent à l'herbe avec un modeste appoint de blé et d'avoine, matin et soir. La ponte varie, selon la race et l'âge des poules, de 80 à 120 oeufs par an, pendant plusieurs années. La Gauloise dorée et la Houdan donnent des oeufs à coquille blanche ; la Géline, à coquille teintée, la Marans est la poule aux oeufs d'or, l'épaisseur exceptionnelle de leur coquille double le temps de conservation. La couleur des oeufs n'influe pas sur leur qualité. Celle-ci reflète la santé et la rusticité de l'animal.
Afin de supprimer les barbares exploitations de poules et poulets en batterie, suivons les recommandations du Docteur Vétérinaire Lissot [1] : « Compter trois hectares de prairies pour mille poules, soit 335 poules à l'hectare. » J'ajoute, avec, si possible, un parcours supplémentaire en sous-bois, en tout cas, obligatoirement, arbres, arbustes, buissons, haies, pour que les poules puissent se reposer à l'abri des intempéries ou du soleil brûlant. « L'herbe est indispensable à la réussite de l'élevage car elle comporte la vitamine A, nécessaire à la croissance et au bon état des muqueuses qui protègent l'organisme contre les atteintes des parasites et des microbes. »
Or, la réglementation européenne accepte qu'il y ait 4 000 poulets et 3350 poules pondeuses à l'hectare pour l'Agriculture biologique ! [2] Ce qui est inadmissible et ne répond en rien à l'esprit bio qui se révèle être le respect de l'être humain, de l'animal et du milieu. Aussi, ne devons nous exiger, dans le Cahier des Charges bio, 600 poulets ou poules pour trois hectares de prairie, soit 200 têtes à l'hectare ? Nous répondrions ainsi, en l'améliorant, aux vœux du Docteur Vétérinaire.
J'ajoute que l'élevage naturel, remplaçant les exploitations industrielles dites « en batterie », « bio », « en plein air », voire « en liberté » [3], donnerait de nombreux emplois « verts ». Ainsi pourrions-nous contribuer à l'aménagement du territoire en repeuplant la campagne. En effet, la présence humaine, dans l'élevage naturel s'avère indispensable et nombreuse. Les Gallinacés, animaux domestiques, ont besoin de gardiens attentifs pour s'épanouir et prospérer. Ce sont des créatures vivantes sensibles qui connaissent bien les personnes qui s'en occupent et le montrent, notamment par une ponte plus abondante.
Jean Domec, 1998
[1] Les maladies de la basse-cour, ed. Flammarion, 1943.
[2] Réglementation européenne, Secodip, 1991 ; Observez 1993.
[3] (2500 poulets, au plus, à l'hectare pour le « Poulet fermier de Loué », « élevé en liberté », et 1000 poules pondeuses à l'hectare pour les « oeufs des poules fermières de Loué, élevées en liberté »)
édité par Christian Domec - xhtml - css - roseau - stat - rss - màj - m@nuscrit - potière