In memoriam : Jean Domec

pleine chèvre ou trace
Sente de la chèvre qui bâille : le livre

Lire La Chèvre jaune & Balade caprine à travers la littérature tourangelle

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Jean Domec était un voisin. J'allais chez lui échanger : des articles, des journaux, des impressions. Il me demandait mon avis sur des articles qu'il préparait et moi, par son truchement, me tenais parfaitement au courant des problèmes d'élevage intensif (son dada qui le rendait parfois... chèvre), du statut de l'élevage des chèvres en France, dans la Région et en Touraine, et des maladies des animaux d'élevage.

Jean Domec était un ami. Je l'écoutais et le regardais faire avec admiration pour sa constance dans son combat contre l'intensivité de l'agriculture, étonnement pour son entregent puisqu'il touchait jusqu'aux grands médias nationaux.

Je sais combien il était sensible - je l'ai aidé après la mort d'une de ses chèvres - combien il avait le cœur dans la main - il a constamment acheté des livres pour nos enfants ou petits-enfants (je parle ici de tous ses amis) - donné des photos de chèvres, fourni des documents - combien il était serviable et didactique. Nombre d'écoles ont été accueillies à Roidemont, combien de groupes de la Société de Protection de la Nature ou de Saint-Avertinois pour la journée du patrimoine ? Il montrait ses chèvres, ses oies, ses poules, sa propriété, faisant partager son amour de la nature aux plus jeunes.

Jean Domec était un humaniste. Tolérant en matière religieuse, ouvert vers les autres, il supportait cependant mal le bureaucrate nocif, le décideur en matière de campagne et d'agriculture qui risquait de n'avoir jamais mis les pieds dans un guéret ou dans un pré. La littérature et la philosophie alimentaient journellement ses lectures de berger lorsqu'il gardait ses chèvres. Il lisait aussi bien les philosophes antiques que les plus modernes et démontrait combien le cartésianisme prolongé nous avait mené à des impasses.

Jean Domec était un écologiste. Il faut l'avoir vu amener, lors d'une sortie des membres de la SEPANT dans les Puys du Chinonais, ses deux chèvres à l'arrière de sa 2 CV pour comprendre après coup que c'était moins le symbole du retour à la nature qu'il affirmait alors, que la liberté et le bonheur qu'avec plaisir il donnait à ses deux animaux dont la vocation naturelle est la tonte des repousses et des arbustes.

Les pourcentages élevés de chèvres ou de vaches malades dans les élevages le faisaient bondir. Pour lui, il fallait sortir les bêtes et leur rendre le contact avec la nature. Il avait raison quand il démontrait que les chèvres en liberté - ce qu'il expérimentait lui-même - donnaient plus de lait et d'une meilleure qualité car ces dames choisissant leur nourriture produisaient des cocktails laitiers du meilleur goût. Oui, mais voilà, comment concilier cela avec le souci de la rentabilité ? Ces remarques ne le désarmaient pas le moins du monde et il continuait sa démonstration. Il faut avouer qu'à lui seul il a quand même enfoncé certains clous auprès des syndicats agricoles, des éleveurs et des médias spécialisés. Bravo pour son action ! Ce n'était vraiment pas assuré au départ et il n'hésitait pas - dans une réunion importante - à déstabiliser par des chiffres, des constats et des références bibliographiques, des économistes, des politiques et des discoureurs un peu trop sûrs d'eux.

Jean Domec est parti. Nous ne verrons plus sa Dyane bleue dans les rues de Saint-Avertin, sa grande silhouette en loden vert et ce marcheur à qui la cape de berger permettait de sortir par tous les temps. Nous avons tous pensé à un moment ou à un autre qu'il allait parfois loin dans ses assertions ou ses démonstrations et pourtant il va beaucoup nous manquer. Combien on peut avoir besoin d'hommes de ce genre ! Mais... sans que nous le sachions encore, il a peut-être imprégné un ou plusieurs jeunes qui, un beau jour, peut-être avant leur retraite, vont soudain laisser qui, un ministère, qui, un commerce, qui, une profession libérale, pour venir à la terre remplir une vraie mission : contribuer, à leur humble place, au sauvetage conjoint de l'espèce humaine et du monde animal.

Jean-Mary Couderc, 2005

ancien président de la SEPANT

(Société pour l'Étude, la Protection et l'Aménagement de la Nature en Touraine)


Pour chevroter dans la sente, il suffit de proposer un texte en contactant directement christian(à)domec.net.




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