Un sage ou peut-�tre un sot
pleine chèvre ou traceLire La Ch�vre jaune & Balade caprine � travers la litt�rature tourangelle
� Quand je fus sur le sommet, je dis au moine qui m'accompagnait : « Mon p�re, comme vous devez �tre bien ici ! »
Il r�pondit : « Il y a beaucoup de vent, Monsieur » ; et nous nous m�mes � causer en regardant monter la mer, qui courait sur le sable et le couvrait d'une cuirasse d'acier.
Et le moine me conta des histoires, toutes les vieilles histoires de ce lieu, des l�gendes, toujours des l�gendes.
Une d'elles me frappa beaucoup. Les gens du pays, ceux du mont, pr�tendent qu'on entend parler la nuit dans les sables, puis qu'on entend b�ler deux ch�vres, l'une avec une voix forte, l'autre avec une voix faible. Les incr�dules affirment que ce sont les cris des oiseaux de mer, qui ressemblent tant�t � des b�lements, et tant�t � des plaintes humaines ; mais les p�cheurs attard�s jurent avoir rencontr�, r�dant sur les dunes, entre deux mar�es, autour de la petite ville jet�e ainsi loin du monde, un vieux berger, dont on ne voit jamais la t�te couverte de son manteau, et qui conduit, en marchant devant eux, un bouc � figure d'homme et une ch�vre � figure de femme, tous deux avec de longs cheveux blancs et parlant sans cesse, se querellant dans une langue inconnue, puis cessant soudain de crier pour b�ler de toute leur force.
Je dis au moine : « Y croyez-vous ? »
Il murmura : « Je ne sais pas. »
Je repris : « S'il existait sur la terre d'autres �tres que nous, comment ne les conna�trions-nous point depuis longtemps ; comment ne les auriez-vous pas vus, vous ? comment ne les aurais-je pas vus, moi ? »
Il r�pondit : « Est-ce que nous voyons la cent-milli�me partie de ce qui existe ? Tenez, voici le vent, qui est la plus grande force de la nature, qui renverse les hommes, abat les �difices, d�racine les arbres, soul�ve la mer en montagnes d'eau, d�truit les falaises, et jette aux brisants les grands navires, le vent qui tue, qui siffle, qui g�mit, qui mugit, - l'avez-vous vu, et pouvez-vous le voir ? Il existe, pourtant. »
Je me tus devant ce simple raisonnement. Cet homme �tait un sage ou peut-�tre un sot. Je ne l'aurais pu affirmer au juste ; mais je me tus. Ce qu'il disait l�, je l'avais pens� souvent. »
Guy de Maupassant, Le Horla (extrait), 1887
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�dit� par Christian Domec - xhtml - css - roseau - stat - rss - m�j - m@nuscrit - poti�re